Bombardements «effrayants» Des milliers de Russes se réfugient à Belgorod

ATS

3.6.2023 - 20:29

Dès le début de l'offensive russe en Ukraine, Antonina Zaikina, une Russe de 75 ans, avait préparé une valise pour être prête à fuir sa ville de Chebekino, à la frontière ukrainienne. Cette semaine, c'est ce qu'il s'est passé.

Une photo mise à disposition par le gouverneur de la région russe de Belgorod, Vyacheslav Gladkov, sur sa chaîne Telegram, montre des personnes attendant à l'intérieur d'un abri anti-bombes lors d'un bombardement ukrainien dans la ville frontalière de Shebekino, région de Belgorod, Russie, le 31 mai 2023.
Une photo mise à disposition par le gouverneur de la région russe de Belgorod, Vyacheslav Gladkov, sur sa chaîne Telegram, montre des personnes attendant à l'intérieur d'un abri anti-bombes lors d'un bombardement ukrainien dans la ville frontalière de Shebekino, région de Belgorod, Russie, le 31 mai 2023.
KEYSTONE

3.6.2023 - 20:29

Chebekino, cité de 40'000 habitants située dans la région de Belgorod, a subi des tirs d'artillerie d'une intensité inédite, poussant des milliers d'habitants à se réfugier à Belgorod, la capitale régionale à trente kilomètres au nord-ouest, où ils sont pris en charge.

«On est partis de Chebekino parce qu'on a été bombardés tellement fort que les vitres ont explosé», raconte Antonina Zaikina, qui a vécu toute sa vie adulte dans cette ville. Elle dit qu'un de ses voisins a été blessé et amputé de la main.

Le conflit avec l'Ukraine, que le Kremlin a longtemps minimisé, touche désormais pleinement certaines régions russes frontalières, en particulier celle de Belgorod, frappée par des bombardements et même des incursions armées.

L'armée russe a affirmé jeudi avoir repoussé une tentative ukrainienne d'"envahir» la région de Belgorod, une semaine après une spectaculaire incursion d'hommes armés qui a suscité un choc et montré la vulnérabilité des frontières russes.

Ces incursions ont été revendiquées par des groupes se disant russes et combattant pour Kiev. Les autorités ukrainiennes nient toute implication.

Chebekino, depuis des mois, subissait déjà des bombardements réguliers et parfois meurtriers. Mais rien d'aussi fort. «Maintenant, ils frappent le centre de la ville», indique Antonina Zaikina. «Énormément de bâtiments sont détruits.»

Le maire de Belgorod, Valentin Demidov, a affirmé vendredi à l'AFP qu'environ 5000 personnes fuyant les bombardements s'étaient enregistrées auprès des autorités. Plusieurs centaines d'entre elles sont logées dans des centres d'hébergement temporaires ouverts dans la ville.

Le plus grand d'entre eux se trouve dans la Belgorod Arena, un complexe sportif transformé en immense dortoir. Des centaines de lits métalliques y ont été installés et sont occupés par des déplacés.

«Monsieur Poutine»

Margarita Nikolaeva, trente ans, espérait que l'offensive en Ukraine se terminerait vite. Finalement, elle a quitté jeudi Chebekino avec son mari et ses deux enfants de neuf et onze ans lors d'une «petite interruption» des bombardements.

«On était dans la cave de trois à six heures du matin. Quand ça s'est calmé, on est montés en voiture, avons pris les animaux de compagnie et les enfants et on est partis», témoigne la jeune femme.

Margarita et sa famille s'étaient installés dans une maison avec jardin à Chebekino, il y a trois ans, en provenance de Sibérie. Elle avait trouvé facilement un emploi, mais maintenant sa vie est chamboulée.

Evguéni Klioutchnikov, un manutentionnaire de 44 ans, habitant de Chebekino, n'a quasiment pas dormi pendant deux jours à cause des bombardements «incessants» sur la ville. Puis, jeudi, c'en était trop. Il est parti à Belgorod en bus.

«Si le gouvernement ne nous aide pas à reconstruire et ne nous donne pas de logements, tous les habitants (de Chebekino) seront des sans-abris», regrette-t-il. Selon lui, sa ville ressemble désormais à une cité fantôme parsemée de cratères de bombes.

Les évacués interviewés par l'AFP se disent satisfaits de leur accueil à Belgorod, organisé dans le calme et de manière professionnelle. Beaucoup vantent l'action du gouverneur, Viatcheslav Gladkov. Et tous affirment vouloir rentrer chez eux.

«Je m'adresse à notre gouvernement, à monsieur Poutine. Faites attention à nous. Nous, les habitants de Chebekino, avons tout perdu, on a même perdu l'espoir», lance Nadejda Otstavnaïa, une retraitée de 63 ans ayant fui avec son mari.

Elle se dit encore choquée par les bombardements «très effrayants».

Ksenia, une vendeuse de 31 ans, a quitté la ville avec son mari, ses parents, son chien et ses chats et dit avoir toujours confiance en la victoire de l'armée russe.

«Tout est conforme au plan», s'amuse-t-elle, citant le refrain d'une célèbre chanson russe. «On espère que tout ira bien et que les nôtres vont gagner, qu'ils vont les chasser (les Ukrainiens) et qu'on rentrera chez nous.»

ATS