Relèvement de 50 points de base ? La BNS prise en tenaille entre inflation et crise bancaire

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21.3.2023 - 14:11

La Banque nationale suisse (BNS) va se retrouver devant un dilemme jeudi lors de son annonce trimestrielle de politique monétaire. Alors que l'institut d'émission a lancé une phase de resserrement monétaire, à l'instar des autres grandes banques centrales, pour lutter contre l'inflation, la crise du secteur bancaire risque de rendre cet exercice délicat.

La Banque nationale suisse (BNS) va se retrouver devant un dilemme jeudi lors de son annonce trimestrielle de politique monétaire. 
La Banque nationale suisse (BNS) va se retrouver devant un dilemme jeudi lors de son annonce trimestrielle de politique monétaire. 
KEYSTONE

21.3.2023 - 14:11

«La faillite de la Silicon Valley Bank a provoqué une grande incertitude chez les investisseurs, a fait chuter de nombreuses actions bancaires dans le monde entier et a conduit au rachat de Credit Suisse par UBS. Si la crise devait s'accentuer et se propager à d'autres banques et pays, le risque de baisse serait considérable», ont résumé les économistes du centre d'études conjoncturelles KOF.

Depuis la dernière réunion de la BNS mi-décembre 2022, lors de laquelle elle a relevé son taux directeur de 50 points de base à 1%, la situation est devenue bien plus complexe. Le fort resserrement monétaire initié par la Réserve fédérale (Fed) américaine, suivi par la Banque centrale européenne (BCE) et BNS a en effet négativement affecté le secteur bancaire en augmentant le coût du capital.

Elle a provoqué la faillite aux Etats-Unis de trois banques régionales – Silicon Valley Bank, Signature Bank et Silvergate Bank – fragilisant encore plus Credit Suisse, déjà en difficultés et qui a fini par être intégrée de force dans UBS.

L'institut d'émission dirigé par Thomas Jordan devra donc veiller à ne pas fragiliser davantage un secteur bancaire en émoi, d'autant plus que le problème initial d'une inflation élevée n'est pas encore réglé.

Le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) prévoit en effet cette année un renchérissement annuel moyen en Suisse de 2,4% et de 1,0% en 2024. Sur l'exercice en cours, l'inflation, qui a atteint 3,4% sur un an en février, se trouve ainsi encore au-dessus de l'objectif de stabilité des prix que défend la BNS. Ce dernier est défini comme une accélération des prix comprise entre 0% et 2%.

Vers un relèvement de 50 points de base

Malgré les récents événements, les analystes s'attendent jeudi à un nouveau tour de vis monétaire. Arthur Jurus d'Oddo BHF (Suisse) table sur un relèvement de 50 points de base à 1,5% du taux directeur de la BNS. «La Banque Nationale Suisse maintiendra sa discipline monétaire pour limiter les pressions inflationnistes», a-t-il indiqué à l'agence AWP.

«Contrairement à la Réserve Fédérale (Fed) qui doit dorénavant tenir compte de l'impact négatif de ses hausses de taux sur le bilan des banques régionales américaines, la Banque nationale suisse n'a pas provoqué les difficultés de Credit Suisse qui sont spécifiques à cette banque», a souligné M. Jurus.

Alors que la BCE a tranché jeudi dernier pour un nouveau relèvement des taux d'un demi-point de pourcentage afin de combattre l'inflation, la Fed doit annoncer sa décision mercredi soir (heure suisse), laissant peu de marge à la BNS le lendemain.

Au vue de la situation et de la volatilité élevée sur les marchés financiers, un relèvement de 75 points de base du taux directeur par la BNS semble très incertain, a ajouté Maxime Botteron, économiste auprès de Credit Suisse. Il penche également en faveur d'une hausse de 50 points. Ce dernier a rappelé que l'inflation de base (ajustée des prix de l'énergie et de l'alimentaire) a atteint 2,4% en février sur un an, au plus haut depuis l'introduction de cette statistique en mai 2001.

«Nous tablons toujours sur un ralentissement de l'inflation, mais ce processus devrait prendre plus de temps que prévu», a estimé M. Botteron.

Globalement, les resserrements monétaires et le renchérissement des conditions de financement qui en découlent recèlent le danger de voir surgir des risques jusqu'à là inconnus dans d'autres secteurs, a averti Stéphane Monier, directeur des investissements chez Lombard Odier. Pour y faire face, les grandes banques centrales ont annoncé dimanche une action concertée pour améliorer l'accès aux liquidités et rassurer les marchés en pleine crise de confiance dans le système bancaire.

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