Giro Antonio Tiberi, la rédemption du «tueur de chat»

AFP

20.5.2024

Tombé en disgrâce pour avoir abattu le chat d'un ministre à la carabine, Antonio Tiberi poursuit son opération réhabilitation au Tour d'Italie où il fait encore parler la poudre, sur le vélo cette fois.

Antonio Tiberi vise désormais une place sur le podium du Giro.
Antonio Tiberi vise désormais une place sur le podium du Giro.
KEYSTONE

AFP

20.5.2024

A voir le coureur italien de 22 ans endosser soir après soir, avec un grand sourire, le maillot blanc de meilleur jeune du Giro et savourer sa cinquième place au classement général provisoire, on peine à imaginer qu'il y a un an encore il était au trente-sixième dessous.

L'itinéraire du surdoué de Frosinone, au sud-est de Rome, a connu un sérieux couac lorsqu'il a été condamné en 2023 à 4'000 euros d'amende pour avoir tué avec une carabine à air comprimé le chat du ministre du Tourisme et des Postes de Saint-Marin, le micro-Etat où il réside.

Tiberi se confond en excuses, acte son comportement «stupide et irresponsable» et assure ne pas avoir tué l'animal de manière intentionnelle.

Mais le mal est fait. Sur les réseaux sociaux, c'est la curée. Son équipe Trek-Segafredo met fin à son contrat. En un instant, Antonio Tiberi passe de petit prince du cyclisme italien au paria.

Un an plus tard, c'est la résurrection. Pour son premier Giro, il éclabousse la course de sa classe avec sa nouvelle équipe, Bahrain Victorious, où il a trouvé refuge pour tenter de devenir «un meilleur cycliste et un meilleur homme».

Les compliments de Pogacar

Et il s'attire les louanges des plus grands. «Il est le seul à avoir montré qu'il avait des couilles. Il est super fort», l'a complimenté Tadej Pogacar au soir de la huitième étape où Tiberi avait été le seul à oser attaquer l'ogre slovène dans le Parti di Tivo.

En Italie, en mal de champions depuis la retraite de Vincenzo Nibali, vainqueur du Tour de France en 2014, on se remet à rêver.

Avec sa silhouette longiligne (1,82, 62 kg), ses cheveux bruns, son sourire charmeur et son tempérament offensif, le jeune Antonio ne ressemble-t-il pas justement comme une goutte d'eau au requin de Messine ?

Mieux ! Tiberi s'affirme comme un meilleur rouleur que Nibali dont c'était le point faible. Champion du monde du contre-la-montre juniors en 2019 malgré un pédalier cassé, Tiberi a terminé les deux chronos du Giro à la sixième place, ce qui lui ouvre de belles perspectives pour le classement général des grands Tours.

Car il se débrouille bien aussi en montagne, comme il l'a encore prouvé dimanche lors de l'étape-reine où, alors qu'il a connu «la journée la plus difficile de (s)a vie sur un vélo», il a réussi à limiter la casse pour sauver son maillot blanc.

Bonbon

«J'espère le défendre lors de la dernière semaine», souligne l'Italien qui pointe à 9 min 26 sec de l'inaccessible Pogacar et conserve 19 secondes d'avance sur le sixième, le Néerlandais Thymen Arensman, également en lice pour le titre de meilleur jeune.

L'objectif ultime, même s'il s'annonce difficile, reste de ramener un podium à Rome, qui serait le premier pour l'Italie dans le Giro depuis trois ans et la deuxième place de Damiano Caruso qui le chapeaute aujourd'hui chez Bahrain.

En attendant, Tiberi essaye de réhabiliter son image écornée. Tous les matins, pendant le départ fictif, il se porte à hauteur de la voiture de direction pour aller chercher un bonbon, image sympathique pour les caméras.

Il raconte aussi qu'il a recueilli un chien errant qu'il a nommé Pluto et qui est désormais son plus fidèle compagnon, lui qui a «grandi au milieu de la nature» et appris à «traire les vaches» pendant son enfance.

Quelques sifflets accompagnent encore ses apparitions sur le podium protocolaire. Mais Tiberi espère que ses résultats vont prendre de plus en plus de place dans sa biographie et chasser le souvenir de son «comportement honteux» envers le chat d'un ministre de Saint-Marin.