France Restitution de deux tableaux de Renoir et Sisley spoliés

ATS

16.5.2024 - 09:00

La France restitue jeudi deux tableaux d'Auguste Renoir et d'Alfred Sisley aux ayants droit d'un galeriste juif, Grégoire Schusterman (1889-1976), spolié pendant l'Occupation nazie.

«Cariatides» de Renoir, représente deux femmes nues dans un style art déco, il a été peint en 1909.
«Cariatides» de Renoir, représente deux femmes nues dans un style art déco, il a été peint en 1909.
imago images/Artokoloro

16.5.2024 - 09:00

La Commission française pour l'indemnisation des victimes de spoliations (CIVS) a considéré que Grégoire Schusterman «avait dû vendre les deux tableaux en raison des persécutions antisémites, pour fuir Paris et subsister pendant la guerre et qu'il s'agissait donc de ventes forcées».

Elle a dès lors recommandé leur restitution à ses ayants droit, a précisé à l'AFP le ministère de la Culture.

Il s'agit des «Cariatides» de Renoir, représentant deux femmes nues dans un style art déco, peint en 1909. Le galeriste l'avait acquis aux enchères en 1939. Après la Seconde Guerre mondiale, le tableau avait été récupérée par les Alliés au château de Thalhausen, en Bavière.

Le deuxième tableau, intitulé «Les Péniches», a été peint en 1870 par le peintre britannique né en France Alfred Sisley et représente un port normand dans lequel sont amarrées des péniches. Il avait été retrouvé en Rhénanie.

Durant la Seconde Guerre mondiale, les nazis ont pillé méthodiquement les oeuvres d'art détenues par les juifs, qui ont été revendues, collectionnées par les hauts dignitaires ou destinées au mégaprojet de musée «Führermuseum» de Hitler.

Dans la France occupée, les oeuvres pillées transitaient par le musée du Jeu de Paume, à Paris, avant d'être envoyées en Allemagne. Elles ont aussi fait l'objet d'un important trafic.

Grâce aux notes clandestines prises par une attachée de conservation, Rose Valland, quelque 60'000 oeuvres et objets ont été récupérés en Allemagne et renvoyés en France, sur une estimation de quelque 100'000 spoliés. Un chiffre qui «semble sous-évalué, de nombreuses familles n'ayant pas signalé la disparition de leurs biens à la Libération», souligne le ministère.

Les deux tiers d'entre eux, environ 45'000, ont été restitués à leurs propriétaires avant 1950. La plupart des autres pièces ont été vendues, à l'exception de quelque 2200 non réclamées, confiées à titre provisoire à la garde des musées nationaux.

Ventes forcées

Pendant l'Occupation, les deux tableaux restitués jeudi avaient été «transportés au (point de rassemblement des oeuvres) de Munich pour le Renoir et à celui de Baden-Baden pour le Sisley, puis rapatriés en France. Ils ont été sélectionnés en 1950 parmi les 15'000 dernières oeuvres revenues d'Allemagne et non restituées et sont devenus des oeuvres +Musées nationaux récupération + (MNR)», selon le ministère.

Depuis les années 1950, les oeuvres MNR ont été confiées aux musées de France. Elles sont répertoriées et peuvent être rendues aux descendants des propriétaires spoliés, souvent après de longues démarches.

Au total, depuis 1950, 188 oeuvres et objets MNR et assimilés ont été restitués.

Contrairement aux oeuvres MNR, d'autres oeuvres spoliées entrées dans les collections publiques ne pouvaient être restituées qu'au cas par cas avec l'adoption d'une loi spécifique, en vertu du principe d'inaliénabilité des oeuvres d'art des musées.

Une loi-cadre de juillet 2023 a ouvert une dérogation à ce principe pour les biens spoliés dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945. Le propriétaire public (Etat ou collectivité territoriale) peut désormais décider la restitution d'un bien spolié après avis d'une commission administrative ad hoc.

ATS